La résilience est un terme utilisé pour parler des matériaux et de leurs résistance aux chocs. Nous avons ici décidé d’appliquer ce terme aux femmes africaines et à leurs capacité de lutter contre les chocs et de se relever après ceux-ci. En effet, les femmes africaines sont trop souvent dépeintes comme des marionnettes du destin, comme les premières des victimes impuissantes de la fatalité et des crises à répétition qui secouent le continent . Nous voulions ici sortir de cette image misérabiliste, très vendeuse, afin de montrer à travers des exemples concrets que la femme africaine, d’hier et d’aujourd’hui, ne s’est jamais laissée enfermer dans une situation de victime perpétuelle, a toujours lutté pour sa survie et ses droits et s’est toujours remise des chocs à répétition dont elle a pu faire l’expérience.


Abla Pokou


ABLA POKOU

A présent  je vais te parler celle que je considère comme mon arrière arrière arrière arrière arrière arrière (continuer la chaîne)  grand -mère : La Reine Pokou. Je vais t’expliquer pourquoi : ma mère est issue de l’ethnie Baoulé de Côte d’ivoire (donc moi aussi par extension, forcément) et je me suis toujours demandé d’où les femmes de ma famille tenaient cette force de caractère. Et bien figure toi que quand petite, on m’a raconté l’histoire de Pokou pour la première fois, j’ai trouvé la réponse à ma question. L’histoire de Pokou est le mythe fondateur du peuple  Baoulé de Côte d’ivoire. Le peuple baoulé  a pour caractéristique d’être matrilinéaire et c’est là que commence l’histoire (et les problèmes)  de notre chère  Pokou. Tu veux en savoir plus n’est-ce pas ? Alors assied toi bien confortablement, ouvre tes oreilles (ou plutôt tes yeux) et prépare ton esprit à accueillir l’histoire et la légende de mon arrière arrière arrière (...) grand-mère.  


Abla Pokou est née au XVIII  siècle au sein du peuple Ashanti  qui se trouve dans l’actuel Ghana. A la suite de la mort du roi en place, son oncle Osseï Tutu, une lutte fratricide s’engagea pour le trône. Dans la culture matrilinéaire des Ashanti,  l'enfant issu de la sœur d'un roi défunt a plus de chance de succéder à ce dernier que l'enfant d'un frère dudit roi.  La vie de Pokou était donc mise en danger par ces luttes de pouvoir. Elle prit donc la décision de fuir avec tous ceux qui voudraient bien la suivre. Dans sa fuite, le cortège arriva sur les rives du fleuve Comoé, une frontière naturelle entre le Ghana et la Côte d’ivoire. Le fleuve était déchaîné, Pokou et sa cour étaient pris au piège,  il leur était impossible de traverser le fleuve et leurs poursuivants les suivaient de très près.  Ils étaient désespérés. Pokou se tourna vers son devin et lui dit "Dis-nous ce que demande le génie de ce fleuve pour nous laisser passer!" Le vieil homme totalement abattu lui répondit : "Reine, le fleuve est irrité, et il ne s'apaisera que lorsque nous lui aurons donné en offrande ce que nous avons de plus cher ». A ces mots, les femmes de la cour sortirent leurs parures d’or et d’ivoire, et les hommes offrirent leur bétail. Mais le devin déclara «  non, ce que nous avons de plus cher ce sont nos fils ».  Aux regards apeurés et au silence qui s’installa, Pokou compris que c’est à elle qu’il revenait de faire ce sacrifice. Avec dignité, elle détacha son pagne et l’enfant qu’elle portait sur son dos, Kouakou, son seul fils. Elle  s’avança vers le fleuve et dit « "Kouakou, mon unique enfant, pardonne-moi, mais j'ai compris qu'il faut que je te sacrifie pour la survie de notre tribu. Plus qu'une femme ou une mère, une reine est avant tout une reine ! " et elle sacrifia son unique enfant. Le sacrifice ainsi fait, les eaux troublées de la Comoé se calmèrent comme par magie et la cour put continuer son douloureux exil vers sa nouvelle terre d’accueil. Une fois le fleuve traversé, la reine murmura dans un sanglot « ba-ou-li »,  « l’enfant est mort ».C'est ainsi qu'en souvenir de cet enfant, la tribu d'Abla Pokou fut appelée "Baoulé", et que le berceau du peuple Baoulé reçut le nom de Sakassou, autrement dit, "le lieu des funérailles". La reine Pokou régna pendant de longues années, d’un règne d’une splendeur sans égal et s’éteignit aux alentours de l’année 1760.




C’est une histoire fascinante n’est-ce pas ? également un peu sanglante je te l’accorde,  mais  pour moi, Pokou représente l’exemple même de la lutte et de la résilience de la femme africaine et c’est pourquoi nous avons choisi de donner son nom à ce projet. Tu vas rire mais je me suis toujours demandé pourquoi Disney n’avait aucune princesse africaine  dans son écurie,  j’ai toujours trouvé que tous les éléments étaient réunis dans l’histoire de Pokou pour faire un excellent film animé Disney. Ah oui,  il y manque peut-être un prince charmant ? les princesses qui se sauvent toutes seules et qui sauvent leurs peuples ne doivent pas vraiment intéresser Disney.  Heureusement, certains  n’ont pas attendu qu’une grande entreprise de films animés s’intéresse  à leur héritage et ont décidé de créer  eux-mêmes un film animé sur la reine Pokou. Tu trouveras le lien plus bas.



Va en paix et que la force de Pokou soit avec toi.

Mau


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